Être d’Action Française, c’est œuvrer à la restauration nationale, c’est-à-dire au redressement d’une nation – cadre nécessaire pour qu’une parcelle d’humanité puisse bâtir le bien commun.                                      

Ce grand mouvement nécessite que nous pensions clair et que nous marchions droit selon l’adage qui est le nôtre. Or, rien n’est plus difficile que de penser clair quand les esprits partent à vau-l’eau et ne parviennent pas à se rattacher au roc de la pensée classique occidentale.

Aussi, avant même de s’instruire, de se cultiver ou de se forger ce que l’on peut nommer une bonne culture politique, il convient d’écarter certains vices de la pensée qui nous ôtent toute possibilité de saisir le réel – car il ne s’agit jamais que d’essayer de s’ancrer dans ce réel. Pour illustrer notre propos, nous nous arrêterons sur deux exemples, deux a priori de la pensée, deux vices de celle-ci.

Le premier vice se divise en deux maladies : la pensée légale et la pensée complotiste.

Les rouages des différents événements que nous subissons sont toujours difficilement perceptibles, dissiper les ténèbres des actes humains n’est pas chose aisée et c’est pourquoi l’esprit peut tomber dans quelques facilités. Deux écueils se présentent souvent à nous, soit considérer que les mouvements sociaux sont systématiquement issus d’une pensée créatrice humaine se réalisant secrètement, soit penser que toute mécanique humaine est nécessairement exposée en pleine lumière.

La personne atteinte du vice de la pensée légale ne pourra jamais imaginer que des gouvernements ne puissent vouloir autre chose que le bien du peuple, que des dirigeants puissent mentir et être à la solde de forces plus discrètes. Quant à la pensée complotiste, elle ne pourra envisager sans réticence que certains actes ne sont posés que par bêtise, incompétence et ce de bonne foi !

L’un pensera que le complot – chose horrible – ne peut exister et n’est que la création d’esprits malades et l’autre ne pourra envisager les choses que sous le prisme d’un complot qui n’est plus qu’une grille de lecture appliquée a priori.

Ces deux écueils résultent tous deux d’un complot-centrisme déviant ; le complot est un élément d’une banalité sans nom et ne doit être en aucun cas absolutisé. Quand vous préparez une surprise pour un anniversaire, vous complotez. Quand vous cherchez avec d’autres personnes à nuire à quelqu’un, vous complotez. Le complot est un élément commun de l’action humaine et une arme utilisée couramment pour atteindre un but donné et cela aux différents échelons de nos sociétés. Est-ce que de grandes multinationales complotent contre les peuples pour faire des profits ? Certainement, rien de plus commun et de plus habituel – et ce hors de toute considération morale. Aussi, l’accusation de complotisme, maniée avec hargne en ces temps perdus, ne peut que nous faire sourire tant elle ignore une réalité perceptible immédiatement par tous : le complot est un mode habituel d’action.

Néanmoins, cela ne signifie nullement que tout est complot et que tous les complots s’unissent pour ne former qu’une seule conspiration mondiale – et nous ne disons aucunement que ce n’est pas hic et nunc le cas. Il ne s’agit pas ici de nier les grands complots, mais de rappeler que la mise en pleine lumière d’un complot doit être induite d’une démarche partant des faits.

L’accusation de complot doit être le résultat d’une induction et non une grille de lecture faite a priori de la recherche ; autrement nous ne sommes pas dans une recherche du réel, mais dans un système idéologique qui noiera les saines intuitions dans un flot d’erreurs.

Si le milieu nationaliste semble assez préservé de la pensée légale, il peut être tenté par la facilité qu’est la pensée complotiste, c’est-à-dire le fait d’avoir une grille de lecture toute faite des événements – qui se fonde sur de vrais éléments, mais qui, étant un système, empêche la parfaite adéquation de l’esprit avec la réalité. Or, rappelons avec notre maître saint Thomas d’Aquin que la vérité est l’adéquation de la pensée et des choses (« veritas est adæquatio intellectus et rei »).

Notre force étant d’avoir raison, il est nécessaire que nous nous fondions sur la vérité qui n’est jamais rien d’autre que la saisie des réalités par notre intelligence. Ne soyons jamais idéologues, soyons réalistes et alors, ayant raison, nous pourrons avoir la force de triompher.

Guillaume Staub

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